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Scène, corps et mémoires

17 Mai 2016 , Rédigé par Bernard Andrieu

Les contributions croiseront des approches esthétique, anthropologique, sociologique, d’Histoire générale ou encore d’Histoire de l’art. Pour mettre en œuvre cette diversité d’approches, trois axes de réflexion orienteront cette journée :

Le premier axe envisagera le corps comme scène de la mémoire. Le corps sera ici considéré tel un support d’écriture, une scène sur laquelle joue — ou se joue — la mémoire de certains événements individuels et/ou collectifs. Chargé de mémoire (ornements, blessures…), il est ausculté à même le plateau. Comment le corps de l’interprète, tel qu’en lui-même ou sur lequel on agit concrètement pour examiner les traces inscrites en lui ou sur lui au fil du temps (Romeo Castellucci...), se manifeste dans sa singularité en tant que support dramatique ? Cet examen de la mémoire à travers le corps peut par exemple passer par la douleur physique. Alors le corps souffrant pourrait être le territoire d’expression d’une destructivité ou d’une re-construction de soi (Angelica Liddell, Jan Fabre…), tout en tenant parfois compte de son inscription dans une mémoire collective. Il sera ainsi question du corps mis en scène de sorte qu’il soit le seuil à franchir afin d’accéder à des événements passés.

Dans le deuxième axe la scène sera prise comme un lieu d’inscription de la mémoire par les corps. Dans la grande variété des formes scéniques contemporaines qui nous intéresseront lors de cette journée, nous serons attentifs aux processus (esthétiques, dramaturgiques ou techniques) par lesquels l’interprète se fait corporellement l’opérateur d’une présentification du passé. Sur ce point, c’est donc la notion de présence scénique qui sera ici particulièrement interrogée ; ou comment la présence concrète de l’acteur peut-elle être troublée par un ensemble de données qui la charge d’une fonction d’évocation autre, voire surnaturelle. Pour prendre l’expression employée par Monique Borie dans son essai Le Fantôme ou le théâtre qui doute, nous pourrons réfléchir au corps de l’acteur, du danseur ou du performeur comme figure de « l’entre-deux » dont la présence rassemble des temporalités multiples et a priori inconciliables.

Enfin, le troisième axe de réflexion se proposera d’interroger l’implication des corps dans le processus nécessairement mémoriel de la reprise ou de la re-création. Aujourd’hui, de nombreux artistes de la scène s’essaient à « l’hommage », creusant le passé, fouillant une histoire plus ou moins récente. Émergent alors la question de l’archive et la notion d’héritage – parfois si redoutée par les artistes tant elle représente un poids quant à l’idée de filiation. N’est-ce pas d’une certaine manière une tentative de ré-incarner un événement pour mieux appréhender le réel et les temps à venir ? Qu’interrogent les corps dans cette traversée du temps ? Que nous donnent à voir, par exemple, les 200 « versions » du Sacre du Printemps connues ?Ou la relecture de la Danse de la sorcière, dont il reste peu d’images,par Latifa Lâabissi en 2012 dans Écran somnambule ? Quelle(s) lecture(s) possible(s) de la mémoire du corps vieillissant de l’interprète proposaient Antoine Vitez et Giorgio Strehler dans les reprises successives d’Électre ou d’Arlequin serviteur de deux maîtres dans lesquelles Evelyne Istria et Ferruccio Soleri tinrent, plusieurs années durant, le rôle-titre

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