L'imaginaire post-humain
Alexandre Klein (ed.), Les sensations de santé. Pour une épistémologie des pratiques corporelles du sujet de santé, Presses universitaires de Nancy, 2010, 299 p.
Les pratiques corporelles faisant appel à la sensorialité, au vécu sensible et mettant en jeu les sensations se multiplient dans notre société occidentale contemporaine. Sophrologie, kinésiologie, taï chi, qigong, yoga, réflexologie, ostéopathie, shiatsu, eutonie, gélothérapie, massothérapie, relaxation proposent de développer le bien-être, voire pour certaines de participer directement à l’amélioration de la santé. Résultats d’une représentation contemporaine de la santé comme ressenti positif, comme bien-être, voire comme mieux-être, ces nouvelles pratiques de santé interrogent directement la médecine et la société elle-même en questionnant notre représentation de l’Homme.
Quelles sont donc ces nouvelles pratiques de santé axées sur la sensation qui émerge dans notre société ? Qu’est-ce que signifie le développement de ces pratiques ? Que nous apprennent-elles sur notre mode de vie, sur notre monde social et sur nous-mêmes ? De quelles manières modifient-elles notre représentation de la santé ? Quelle est l’influence de ces pratiques sociales et individuelles sur la médecine ? Comment se construit finalement notre rapport à la santé, donc à nous-mêmes, au monde et aux autres, avec cet accent mis sur les sensations ? C’est à ces questions que tente de répondre ce volume consacré aux « sensations de santé ».
Rassemblant les contributions de philosophes, d’historiens, de psychologues, d’anthropologues, de sociologues, de praticiens de la santé et de médecins, cet ouvrage entend proposer un espace de problématisation des questions contemporaines de santé autour de la sensation. Les sensations de santé se dévoilent comme une interrogation pluridisciplinaire sur l’être humain et sa vie contemporaine.
Préambule de François Dagognet
Introduction
Alexandre Klein : « Les sensations de santé » Pour une philosophie des pratiques corporelles du sujet de santé
I. Les pratiques corporelles contemporaines entre santé et sensation
Elise Requilé : « « Le corps, lui, ne ment pas » : Pratiques psycho-corporelles de développement personnel et exaltation de la sensorialité. »
Arnaud Van de Casteele : « Les cultures sensitives de la Fée Verte et les usages éprouvés en matière de santé du corps absinthé »
Florencia Tola : « Chamanisme et sorcellerie chez les Toba (Qom) du Gran Chaco sud-américain. Quelques remarques sur une conception non individuelle du corps »
II. Obstacles et incompréhensions : le problème des sensations de santé
Géraldine Caps : « De la pluralité des représentations du corps humain dans les transplantations d’organes »
Florence Quinche : « Perceptions médicales versus sensations internes. Percevoir la maladie : le point de vue médical face au ressenti du sujet »
Stéphanie Pache : « Pratiques contraceptives et construction identitaire. L’assignation à son sexe par une pratique corporelle de santé »
III. La sensation dans le champ médical : espoirs et créativité
Evelyne Courjou : « La pudeur du tact corporel »
Fanny Soum-Pouyalet & Annie Hubert : « Le cancer comme rite de passage. Approche anthropologique des sensations en cancérologie »
Elsa Gisquet : « Les cyborgs, L’expérience des malades parkinsoniens traités par neurostimulation »
IV. Les implications et renouveaux théoriques des sensations de santé
Jérémie Rollot : « La « télésanté » : santé sans sensations ? »
Jocelyne Vaysse : « De l’acte à la santé : un exercice mouvementé »
Bernard Andrieu : « Sentir sa santé »
Séminaire 2010-2011
Histoire, Epistémologie et Philosophie
des sciences du corps
sous la direction de Bernard Andrieu et Alexandre Klein
Mercredi 25 mai 2011
Au Muséum-Aquarium de Nancy
Rue Ste Catherine
A 17h
Alexandre Klein
« L’imaginaire du posthumain :
un lieu pour repenser l’humanisme médical ?»
Alors que le renouvellement de la loi de bioéthique fait débat entre les députés, les
sénateurs et les médecins, la question d’un reproblématisation de l’éthique médicale se
révèle, avec plus de force encore, comme un chantier nécessaire de notre présent. L’idéal
modèle du colloque singulier ne fait plus sens et le pluralisme médical demande à la
médecine d’enfin prendre en compte cette société qui fut toujours le tiers de la relation
médecin/malade. Mais dans notre société postmoderne où la figure de l’homme ne
légitime plus le savoir, dans cette société de contrôle où les dividus s’autodéforment,
comment envisager une éthique pour la discipline proprement humaine qu’est la
médecine ? Faut-il abandonner l’humanisme face à cet homme contemporain fractal,
fuyant et multiple ? Quelle peut être l’éthique du « nouvel homme nouveau » qui habite
déjà notre quotidien ? C’est à ces questions que nous tenterons de répondre en analysant
l’imaginaire du posthumain, ses présupposés philosophiques et ses conséquences
anthropologiques. Nous pourrons ainsi esquisser les conditions d’une éthique (et donc
d’une politique) qui réponde aux exigences de la biomédecine contemporaine et des
biotechnologies sans pour autant rompre avec la médecine clinique moderne ; une éthique
de l’interface singulière qui ne soit pas un alibi (Sicard), mais une philosophie pratique
aux fondements et au coeur des pratiques médicales et biomédicales contemporaines.
Alexandre Klein est philosophe et historien des sciences. Après deux ans d’enseignement en Sciences
de l’éducation et auprès de professionnels de santé, il achève actuellement une thèse sur le corps et le
sujet dans la médecine contemporaine sous la direction de B. Andrieu à l’université Nancy 2 au sein
du LHSP Archives H. Poincaré (UMR 7117 CNRS/ Nancy Université). Ses travaux portent
essentiellement sur les représentations et usages du corps et leurs relations avec la constitution de
l’identité, notamment dans les pratiques de santé. Il est l’auteur de plusieurs articles d’histoire, de
philosophie, d’éthique et d’épistémologie de la médecine, et a dirigé en 2010 un volume collectif sur
Les sensations de santé (Presses universitaires de Nancy).