Genre en classe de 1er

INTERVIEW - Le député UMP de la Drôme réagit à la polémique naissante auprès de 20Minutes...
Luc Chatel a envoyé ce mercredi une fin de non recevoir aux 80 députés UMP réclamant le retrait d'un manuel de Sciences de la vie et de la Terre (SVT) dont ils contestent un chapitre sur l'identité sexuelle des individus abordant notamment la théorie du genre. Hervé Mariton fait partie de ces parlementaires. Selon lui, il n’y a toutefois «aucune police des mœurs, aucune homophobie» derrière cet affront.
Qu’est-ce qui est le plus gênant pour vous, le contenu de la théorie des genres ou sa présence dans un manuel scientifique?
La théorie du genre n’est pas une réalité scientifique, elle n’a pas sa place dans un tel manuel.
De plus, cela affaiblit l’ouvrage dans son ensemble et on habitue les jeunes à récuser des données scientifiques. En revanche, s’agissant d’un enseignement au lycée, si la théorie des genres
devenait un enjeu de société, il ne serait pas interdit qu’elle soit abordée en cours de philosophie. Même si j’aurais dit non sur le fond.
Est-ce vraiment au politique de s’emparer de cette affaire?
Ce n’est pas le Saint-Esprit qui fait les programmes! Nous en avons parlé ce mercredi matin au bureau politique de l’UMP. Un très large consensus de députés de différentes sensibilités estime que
l’exécutif doit prendre ses responsabilités dans la rédaction des manuels scolaires. Il doit définir, préciser, expliciter le programme auprès des éditeurs, notamment quand ces contenus
critiquables sont abordés.
Luc Chatel ne semble pas être en mesure de répondre à votre demande, qu’allez-vous faire?
La réaction du ministre montre qu’il n’a pas envie de prendre ses responsabilités, mais il ne peut pas y échapper et nous allons bien lui faire comprendre. Les éditeurs de manuels scolaires
rédigent leurs ouvrages avec les indications et le contrôle du ministre. Et le ministre agit sous le contrôle du Parlement.
Christine Le Doaré, présidente du centre LGBT de Paris Île-de-France.
Les nouveaux manuels de sciences s’ouvrent à la diversité
Mais au-delà de l’éventuelle instrumentalisation politique, les associations de défense des droits des homosexuels saluent une réelle avancée. Pour Christine Le Doaré (photo), présidente du centre LGBT (Lesbien-Gay-Bi-Trans) de Paris Île-de-France, interrogée par LexTimes.fr, « c’est

D’autant que ces quelques lignes dans des manuels de plus de 200 pages pourraient bien faire évoluer les mentalités des jeunes générations sur la sexualité. Pour l’ancienne présidente de SOS homophobie, les jeunes gays vont pouvoir « se rendre compte que l’homosexualité fait partie de la vie, et qu’ils n’ont pas à se poser des questions métaphysiques — le rejet intériorisé pouvant parfois conduire au suicide. Ils vont se reconnaitre, cela va valoriser leur existence ». Ce ne sera donc plus une sorte de « stigmate » mais un vrai « choix ».
Et si certains passages peuvent prêter à confusion — notamment sur la transsexualité, faussement liée au travestissement dans le manuel Bordas —, globalement l’ancienne présidente d’SOS homophobie se dit « franchement favorable » à l’introduction de ce nouveau chapitre. Elle ajoute même : « J’y ai trouvé des choses excellentes : il est notamment dit qu’un homme homosexuel peut très bien avoir une identité masculine très forte, et qu’une femme très féminine peut être attirée par les femmes. Le manuel Bordas aborde aussi très justement la question du conditionnement social. C’est vraiment très important de rappeler tout cela ».
L’œil de la spécialiste pointe tout de même les revers de l’effort de vulgarisation réalisé dans ces manuels — destinés à des élèves de première : « c’est parfois un peu réducteur, comme pour l’orientation sexuelle, dont il est dit qu’elle ne touche qu’à l’intimité alors que ce n’est pas qu’une question de sexualité ».
Et quand on évoque les réactions de la droite catholique, Christine Le Doaré ne mâche pas ses mots, dénonçant un véritable « fonds de commerce ». « Dire que cela va favoriser l’homosexualité ou faire parler les jeunes de sujets auxquels ils n’auraient jamais pensé, c’est n’importe quoi » ajoute-t-elle. « Les catholiques peuvent s’arcbouter autant qu’ils peuvent… C’est comme pour le mariage des couples de même sexe. Même l’Espagne, qui est un pays catholique et latin, y est venu. On y viendra aussi en France. Ils ne pourront pas à coup de dogmes religieux arrêter la marche vers l’égalité des droits. C’est quand même dans l’ordre des choses ! »
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(1) L’éducation sexuelle est alors limitée aux aspects biologiques et reproductifs, la réflexion étant tout de même ouverte « sur ces sujets » (Circ. n° 73-299 du 23 juillet 1973 dite Circulaire Fontanet, du nom du ministre de l’éducation nationale de l’époque).
(2) Arrêté du 21 juillet 2010 fixant le programme d'enseignement spécifique de sciences en classe de première des séries ES et L, J.O., n° 199, 28 août 2010, p. 15587, n° 22